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Argentine : le coût du football pour tous

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En août 2009, il y a trois ans, le gouvernement argentin de Cristina Kirchner procédait à une "nationalisation" originale : celle des transmissions de football.

L’idée a germé dans la tête de l’ancien président, Nestor Kirchner, qui continuait à fonctionner en tandem avec son épouse : le "couple présidentiel", disait-on à Buenos Aires.

A l’origine, c’est le groupe média Clarin - devenu par un retournement de situation l’ennemi numéro un des Kirchner - qui détenait les droits de transmission sur une chaîne câblée. A l’époque, l’Association du football argentin (AFA) réclame davantage pour renflouer les clubs, la plupart au bord de la faillite. Clarin juge l’addition excessive. Nestor Kirchner voit la chance de faire d’une pierre deux coups. L’Etat fait une offre à l’AFA et affaiblit par la même occasion Clarin.

Le nouveau programme est baptisé "Futbol para Todos" (Football pour tous), il passe sur une chaîne publique et peut être repris sur les chaînes de province à condition de ne pas y toucher (ni de retrancher, ni d'ajouter.) C’est un paquet cadeau, à prendre ou à laisser.

Pour les Argentins, passionnés du ballon rond, c’est tout bénéfice. Désormais, on supporte gratis, chacun chez soi, bien à l’abri des "barras bravas" (ces mufles qui infestent les stades de la planète) et des intempéries.

L’Etat devait retrouver ses billes grâce à la publicité. Seulement voilà, à l’exception d’une seule pub privée, le bas de l’écran et les spots sont monopolisés par la propagande gouvernementale, institutionnelle ou d’entreprises publiques. Et le foot sert d’appât au principal programme politique de la chaîne gouvernementale, 6, 7, 8, un sommet de manipulation et de diffamation, qui rappelle la télévision cubaine.

Le quotidien La Nacion a relancé la polémique sur "Futbol para Todos" en publiant le coût de l’opération depuis trois ans : 4 milliards de pesos (720 millions d’euros). Ce chiffre se décompose en droits versés à l’AFA, valeur de la publicité officielle et dépenses de production, diffusion ou commercialisation. La source ? Le Journal Officiel et les chiffres d’affaires des maisons de production ; les tarifs de pub annoncés par "Futbol para Todos" ont permis de faire une estimation.

Malgré l’opacité ou les tergiversations qui règnent sur les comptes et sur les statistiques en Argentine, les 4 milliards n’ont pas été contestés. En revanche, le calcul fait par La Nacion sur les investissements sociaux qui auraient pu être faits avec une telle somme, a été jugé  "démagogique" par les partisans des Kirchner.

"'Futbol para Todos' a démocratisé un bien culturel", affirme ainsi le sénateur péroniste Daniel Filmus. Et de citer en exemple le budget du somptueux théâtre Colon, à Buenos Aires (185 millions de pesos par an), dont la programmation concerne une minorité, sans qu’elle soit remise en cause pour autant.

Les dividendes de l’opération devaient renflouer les caisses des équipes argentines. Or, les clubs ne sont pas sortis de l’ornière. De là à penser qu’une partie des droits a été siphonnée…

La question mérite d'être posée : la dépense de l’Etat est-elle justifiée ou pas, dans une Argentine où un tiers de la population vit dans la pauvreté, où la santé et l’éducation ne sont plus ce qu’elles étaient ?

Les Argentins semblent vivre dans une bulle, dont la clé est le prix record atteint par le soja. Il y a cinq ans, la tonne de soja valait 250 dollars. Ce mois de juillet, elle a dépassé les 610 dollars. L’Etat tire une bonne partie de ses ressources de l’exportation du soja.

Alors, la vieille expression latine "panis et circenses" - du pain et du cirque pour satisfaire le peuple - pourrait se traduire en Argentine par "soja et foot". Ce n’est pas du développement durable, certes, c’est plutôt : "pourvu que ça dure…"


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